L’eau et les bains au Moyen Age

Contrairement aux idées reçues, les hommes et les femmes du Moyen Age ne craignaient pas l’eau. De nombreuses sources font état de l’importance donnée à l’hygiène : enluminures, traités scientifiques, fabliaux… Autant de preuve de la place centrale de cet élément dans le quotidien. Tantôt au service de la détente, tantôt pour ses vertus curatives, l’eau tenait également une place importante dans les rites religieux.    

Les étuves : hygiène et plaisir

Au début du Moyen Age, les nobles des châteaux possédaient leurs propres bains privés. Mais le peuple n’était pas en reste, dans chaque quartier on pouvait trouver des structures  de bains publics appelées les étuves. A mille lieux des somptueux édifices romains, les gens du Moyen Age préféraient la sobriété. Ils se baignaient dans des piscines hors sol en bois remplies d’eau chaude. Si le bain est pratiqué au service de l’hygiène c’est aussi un lieu de détente et d’échange social. Se baigner est une nécessité mais aussi un plaisir ! Etonnement, nos ancêtres avaient déjà inventé le shampoing, le déodorant et le dentifrice. Ils commençaient même à traiter les problèmes de pellicules. Non seulement l’homme du Moyen Age n’était pas crasseux, mais il était également en avance sur son temps ! Les bains de vapeur, probablement ramenés par les croisées des contrées occidentales font également leur apparition dans les usages à cette époque. En plus des bains, des chambres pour se reposer étaient mise à disposition et l’on servait de grands festins pour rassasier les baigneurs. Les étuviers constituaient un corps de métier à part entière dans la société du Moyen Age. Ils étaient chargés de la gestion de grands établissements : entretenir les tuyaux, remplacer l’eau tous les jours et interdire l’entrée aux malades pour éviter les risques de contamination.  

Bienfaits curatifs

Via de nombreux traités de santé, la médecine médiévale s’empare des bienfaits de l’eau et conseille d’ailleurs de laver les enfants trois fois par jour dans des cuviers. Le médecin Barthélemy l’Anglais écrit même que le bain nourrit le corps. Les soins curatifs de l’eau sont exploités : ses bienfaits sont connus de tous. Aldébrandin arguera même dans son traité de médecine « Li baigners en eau douce fait en étuve et en cuve et en eau froide fait la santé gardé ». Les thermes et les cures sont conseillés.  

Rites religieux

Le bain et plus largement l’eau, sont des éléments forts des rites de la société du Moyen Age. Ils symbolisent la purification, le passage et la renaissance. Ce caractère sacré est particulièrement présent dans deux traditions religieuses médiévales : le baptême des enfants, qui marque leur entrée dans la vie et l’adoubement des chevaliers synonyme du passage de l’adolescence à l’âge adulte pour les jeunes hommes.  

La fin des bains

Cependant le développement économique que connait le XVème siècle voit les étuves se muer. Entre les bains chauds, la nourriture et les chambres à coucher, tous les plaisirs du corps sont réunis en un seul et même lieu. Les bains attirent alors de plus en plus de monde et la prostitution se développe malgré les interdictions. Face à cette fâcheuse réputation, l’Eglise met en place une forte répression en interdisant la nudité et la mixité. Mais bientôt les étuves sont dans l’obligation de fermer leurs portes, poussées par l’arrivée de la syphilis et de la Peste Noire apportées par les étrangers de passage. On découvre également que l’eau n’était pas toujours saine à cause des déchets jetés dans les rivières par les tanneurs et autres teinturiers. Le 16ème siècle est donc un tournant : l’eau devient la source de toutes les suspicions.  S’en est fini des plaisirs aquatique, en témoigne la déclaration d’un professeur de médecine en 1513 « estuves et bains, je vous en prie, fuyez les ou vous mourrez ». Les damoiseaux et damoiselles ont peur que l’eau véhicule des maladies dans le corps à travers les pores dilatés par la chaleur de la peau.  Seuls les membres de la royauté prennent encore régulièrement des bains, pour suivre le protocole. Les piscines de bois sont vite remplacées par des espaces de toilette sèche. Le rituel de l’hygiène change : on cherche à désinfecter le corps en se nettoyant notamment avec de l’alcool à 90°.   L’eau tient un triple rôle au Moyen Age : remède, rite sacrée et véritable plaisir. Cependant, les diverses épidémies et le durcissement des mœurs exercé par l’Eglise viennent à bout des bains. Le Renaissance s’annonce donc sous le signe d’un recul de l’hygiène et du déni des plaisirs de l’eau.

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